Louca / Un jour pluvieux

Publié le par nicolas voisin

 Le lendemain fut un jour pluvieux. Dans le parc, les arbres centenaires menaçaient de leur ombre les promeneurs audacieux, pépins en main, botte à botte, marchant deux à deux dans les larges allée de l’ancien monastère, devenu Hôpital, spécialisé dans les longues rééducations.

            La rééducation de Louca s’apparentait à une renaissance, tant il avait d’intrigues à résoudre en parcourant sa sombre mémoire. Ils se souvenait des sunlights, de gloire mais ne ressentait que douleur et incompréhension. Certaines séances étaient plus délicates que d’autres. Il avait eu le plus grand mal à se remettre des deux dernières. L’orgasme qu’il avait revécu hier avait un goût d’unicité, d’exceptionnel, lui avait laissé l’amer impression de présager de plus complexes situations… Quelque chose en particulier le taraudait. Quelque chose de malsain : cette sensation d’avoir vécu une abstinence perverse, d’avoir connue une longue période de troubles, de troubles sexuels notamment. Pourquoi cette précédente nuit avait elle était si agitée ? Le come-back qu’il avait réalisé aurait du l’apaiser. Il sentait, ne pouvais se l’expliquer, comme une forme de prescience, que cet orgasme avait sonné le début, ou peut être la fin, d’une partie de son vécu, acquitté dans la brume.

 

            -«  Je veux voir mon visage, je veux savoir ce que vous savez… Qui suis-je ?!

-         Il n’y a rien à voir… L’inspecteur était froid, glacial, la peau buriné, l’air agacé.

-         Qui êtes vous ? adjura Louca, qui n’avait pas prêté attention à la présence de Tsarcosy jusqu’alors.

-         Inspecteur Tsarcosy, de la criminelle. Je suis votre affaire…vous me comprenez ?

-         Je vous comprends aisément, acquiesça Louca. Et je voudrais comprendre qui m’a fait ça, et qui je suis pour que vous déployez les grands moyens et pour tant intéresser la presse. Et quelle presse ? Qui m’envoie des fleurs ? Où est ma femme ?

-         Vous m’en posez des questions ! Tsarcosy s’était appuyé sur un montant du lit à la Mad Max de Loucabale. Il se tue un instant, se racla la gorge… On a aucune piste, aucun indice, aucun témoignage concernant l’acte de…Barbarie, dont vous avez était victime. Vous seul devez, je l’espère, pouvoir vous souvenir. Le docteur Kabash me dit que ça peut prendre quelques heures comme plusieurs mois. Quand à qui vous êtes… Les psys nous imposent de ne rien vous dire… Cela aussi doit revenir, je crois d’ailleurs savoir que vous avez fait les trois quarts du chemin. C’est ce dernier quart qui nous intéresse. Pour comprendre, comme vous. Sachez cela dit que je ne vous aime pas. Vous me dégouttez. Mais je fais mon boulot, alors… Ne me faites pas  perdre mon temps. Les gens comme vous me donnent envie de… Passons.

-         Les gens comme moi ? s'ahurit Louca. Les gens comment ?

-         Ceux qui font n’importe quoi, qui donnent le pire des exemples, qui détestent tout le monde et … Les nuisibles, les pique-assiette, les enculés de votre race, Loucabale. Mais je vous laisse le loisir de découvrir par vous même… Je crois que ce petit jeu sadique commence à m’amuser. Des heures à vous regarder en chier, c’est un programme de premier choix, de la télé réalité grand écran, grandeur nature, sauvage et cru comme la nature. Vous savez à qui vous me faites penser ? A Lecter, à Hanibal Lecter derrière votre grossier masque qui dissimule si mal vos monstrueuses mutilations. Mais vous n’avez tué personne, vous n’êtes pas un criminel, non, vous ne serez pas mis sur l’échafaud de la justice, non, c’est vous qui êtes sur la première scène, première chaîne, et seul la haine que vous inspirez saura vous punir. A mes yeux, vous êtes une merde, un opportuniste, un pervers, un vicieux, de la pire espèce, un provocateur sans mobil, enfin… pour ce qui reste de vous.

-         Sortez, sortez ! Tenta de beugler Louca, hors de lui devant un tel déchaînement de haine. Sortez, salaud, fumier ! Ces injures restèrent incomprises, trop mal articulées pour être entendues. Tsarcosy n’avait pas chercher à en savoir plus. Il avait vidé son sac. Quelqu’un pourrait les surprendre. On verra bien, songea-t-il en quittant la chambre, si ce connard se remet de ses révélations…  Qu’il chiale. Il ne m‘émeut pas.

 

 

 

 

*

 

 

 

            Quand Joséphine entra dans la chambre trois cent dix sept, Constant Loucabale était au plus mal. Rouge de rage, humide de larme, il avait tenté de se débattre, de bouger… En vain. Il avait hurlé, ses mâchoires vissées l’avaient empêchait d’être entendue. Ses sanglots avait pris le dessus. Ses monotones chuintements l’avait tenu éveillé. Son cœur était anormalement agité. Joséphine s’afféra à le calmer, sans réussite, et du lui injecter un calmant pour retrouver un pouls et une tension acceptables. Louca ne voulait rien lui dire. Il grommela seulement une question : qui est Tsarcosy ?

            -« Un flic haineux et corrompu, un arriviste qui déteste les arrivistes, un pourri et, pour tout arranger, l’inspecteur chargé de mener à bien l’enquête sur la tentative de meurtre et les actes de violences dont vous avez été victime. Je crois qu’il ne vous aime pas plu qu’il n’aime son travail, ou la vie, en générale. C’est un aigri. N’y prêtez pas attention.

-         Merci Jo, merci d’être là, avait seulement répondu Louca.

-         Désolé de m’être absenté. Le docteur m’avait fait appelé. Il souhaite que nous revenions sur vos intuitions… Votre impression de rentrer dans une période trouble, et l’abstinence à la quelle vous avez plusieurs fois fait référence. Mais je ne sais pas si vous êtes suffisamment en forme pour travailler aujourd’hui.

Si, répondit Louca, fermant les yeux. Tout à l’heure. Mettez un peu de musique avant. Un instant. Je dois souffler.

Publié dans romans & nouvelles

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